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Homélie du lundi de Pentecôte


Lundi de Pentecôte, 28 mai 2007,

en la cathédrale Notre-Dame de Chartres.

abbé Pozzetto Excellence,

Chers pèlerins de Notre-Dame,

A l’heure où par milliers vous êtes parvenus au terme de notre 25ème pèlerinage de Chrétienté, véritable « marche religieuse de tout un peuple », entourés par vos saints anges qui vous ont accompagnés, à cette heure du lundi de Pentecôte, trois bougies brûlent, déposées par une main anonyme mais pieuse, dans un tout petit village de France devant une statue de la Très Sainte Vierge Marie. Où ? Et pourquoi ? Me demanderez-vous si la fatigue de ces trois journées ne vous berce pas déjà du sommeil des enfants…

Où ? Au Mesnil-Saint-Loup. Ce bourg où il y a 25 ans quelques-uns d’entre nous décidaient de prendre la route entre deux cathédrales et de devenir des « marcheurs de Dieu ». Beaucoup sont ici ce soir et je les salue avec chaleur, reconnaissance et ma plus vive amitié.

Sous le regard de Notre-Dame de la Sainte Espérance, sous l’inspiration des frères Henri et André Charlier et avec la paternelle présence du révérendissime Père Emmanuel était fondée ce qui allait devenir le pèlerinage de Chrétienté.

Pourquoi trois bougies devant l’autel de Notre-Dame ? Pour rappeler les trois vertus théologales : la Foi, l’Espérance et la Charité. Et aussi les trois piliers de Notre-Dame de Chrétienté : Chrétienté, Tradition, Mission. Thèmes bien connus de ceux qui viennent de les approfondir pendant trois jours.

Permettez moi, chers frères pèlerins, à l’aide de quelques figures, de faire revivre ces 25 années de pèlerinage, et d’allumer en vous, grâce à Notre-Dame, le feu de la Pentecôte en cette Octave, pour les 25 années à venir.

Première bougie : celle de la Foi, la vertu que nous avons reçu au baptême comme le souligne si bien l’ancien rituel de ce sacrement, dans un dialogue sublime à la porte de l’église : « Que demandez-vous à l’Eglise ? – La Foi – Que vous procure la Foi ? – La Vie Eternelle ».

Cette foi catholique prêchée par Notre Seigneur Jésus-Christ sur les routes de Palestine et transmise par l’Eglise depuis Saint-Pierre jusqu’au pape Benoît XVI. Voilà le bien par excellence que nous avons reçu de Dieu, de l’Eglise, de ceux et de elles qui furent nos maîtres, nos évangélisateurs… La foi est transmission, la foi est TRADITION, selon l’étymologie : tradere, transmettre.

Mais j’entends certains d’entre vous se plaindre et gémir : la foi ne nous a pas été transmise, nos livres de catéchèse ne nous ont plus enseignés les quatre grandes vérités à croire, à espérer, à aimer et la manière de prier.

Que faire devant ce qui reste, 40 ans après la clôture du concile œcuménique Vatican II, l’un des drames les plus terribles de la fin du XXème siècle : la non-transmission de la foi catholique dans son intégralité ?

Quitter l’Eglise, la pratique – comme des millions de nos contemporains l’ont fait – quitter le « vieux bateau qui prend l’eau de toutes parts », selon l’expression du cardinal Joseph Ratzinger à la veille de devenir le pape Benoît XVI. NON ! Car comment alors prétendre participer à la restauration de l’Eglise sans l’Eglise ! Comment, frères pèlerins, être catholiques sans être romains ? Et alors, surgit dans ma mémoire le premier cardinal romain – deux autres sont venus ensuite – à avoir participé à notre pèlerinage de Pentecôte, en 1991 : la grande figure du Cardinal Augustin Mayer, qui visitant les centaines d’enfants essuya quelques larmes, et nous montra par sa bienveillance, sa présence et la célébration de la messe latine et grégorienne selon le missel antique, la Paternité et la Maternité de l’Eglise.

Dans le « Bateau-Eglise », nous devons chercher Dieu, chercher Jésus. Permettez-moi de citer notre pape dans son livre paru la semaine dernière en France : « Telle est la grande question qui nous accompagnera tout au long de ce livre [pour nous, de cet après pèlerinage] : qu’est-ce que Jésus a vraiment apporté, s’il n’a pas apporté la paix dans le monde, le bien-être pour tous, un monde meilleur ? Qu’a-t-il apporté ? La réponse est simple – poursuit le pape – Dieu. Il a apporté Dieu, le Dieu dont la Face est lentement dévoilée depuis Abraham… Le Dieu véritable apporté aux peuples de la terre. Il a apporté Dieu : dès lors, nous connaissons sa Face, dès lors nous pouvons l’invoquer. Dès lors, nous connaissons le Chemin que, comme hommes, nous devons prendre dans ce monde. Jésus a apporté Dieu et avec Lui la Vérité sur notre origine et notre destinée : la Foi, l’Espérance et l’Amour. »

Etre catholique, chers frères, c’est être attaché à TOUTE la Tradition de l’Eglise. Une bougie brûle devant Notre-Dame de la Saint Espérance afin de nous apprendre à transmettre, à temps et à contre-temps, le trésor que nous avons reçu, et EN PARTICULIER celui de la MESSE TRADITIONNELLE, dont le Cardinal Ratzinger disait en 2001 à Fontgombault qu’elle était « un critère de référence, refuge pour les fidèles, qui dans leurs paroisses ne trouvent plus une liturgie célébrée réellement selon les textes autorisés de l’Eglise » Un trésor que vous avez reçu de vos pères qui se sont battus pour vous le préserver intact et que vous devez transmettre à votre tour, intégralement à vos enfants car c’est le plus grand et le plus beau moyen de sanctification, particulièrement aujourd’hui. Même menacé par les sirènes du conformisme, du relativisme ou du subjectivisme dénoncés par Benoît XVI, la messe traditionnelle, aujourd’hui célébrée dans cette cathédrale, doit rester la lumière éclatante qui repousse l’erreur et nous guide vers le Christ.

La deuxième bougie est celle de l’espérance. La « petite fille espérance » dont a si bien parlé Charles Péguy, qui avant nous a marché sur cette route, qui, avec Saint Louis, sainte Jeanne d’Arc, les géants de la Vendée catholique et royale, les Cristeros et les Croisés de tous les temps nous appellent – vous appellent – à aimer votre « patrie charnelle ». Et alors résonne dans cette cathédrale – et avec quelle émotion – l’historique sermon du cher père Dom Gérard, fondateur de l’abbaye du Barroux, moine bénédictin, en 1985, dont j’ai l’honneur de citer ce soir, pour les anciens et surtout pour les plus jeunes si nombreux sous ces voûtes et sur le parvis de la cathédrale, devant le voile de Notre-Dame, quelques lignes :

« Chers amis, nous n’avons pas peur de la révolution : nous craignons plutôt l’éventualité d’une contre-révolution sans Dieu ! Ce serait rester enfermés dans le cycle infernal du laïcisme et de la désacralisation ! Il n’y a pas de mot pour signifier l’horreur que doit nous inspirer l’absence de Dieu dans les institutions modernes ! Voyez l’ONU : architecture soignée, aula gigantesque, drapeaux des nations qui claquent dans le ciel. Pas de crucifix ! Le monde s’organise sans Dieu, sans référence à son créateur. Immense blasphème ! […] Ce qu’il y a de plus triste et de plus honteux c’est que la masse des chrétiens finit par s’habituer à ce genre de choses ! »

Et Dom Gérard continuait : « Et bien, contre cette apostasie de la civilisation et de l’état qui détruit nos familles et nos cités, nous proposons un grand remède, étendu au corps tout entier ; nous proposons ce qui est l’idée-force de toute civilisation digne de ce nom : LA CHRETIENTE. » Et il faudrait citer tout le sermon de Dom Gérard…

La chrétienté, combien de fois, à l’occasion de rencontres – même avec plusieurs de nos évêques – ne nous a-t-on pas conseillé de ne plus employer ce mot, non compris par nos contemporains et mal interprété.

NON POSSUMUS ! Nous ne pouvons pas renoncer à proclamer haut et fort ce qu’est la chrétienté. Personne ne pourra et ne peut nous en empêcher !

Alors demandons à Dom Gérard ce qu’est une chrétienté : « Ce n’est pas seulement la cathédrale, la croisade, et la chevalerie ; ce n’est pas seulement l’art, la philosophie, la culture, et les métiers des hommes montant vers le Trône de Dieu comme une Sainte Liturgie. C’est aussi et surtout la proclamation de la royauté de Jésus-Christ sur les âmes, sur les institutions, et sur les mœurs. C’est l’ordre temporel de l’intelligence et de l’amour, soumis à la très haute et sainte royauté du Seigneur Jésus ! C’est l’affirmation que les souverains de la terre ne sont que les lieutenants du roi du ciel. »

Alors, résonne en nous l’interrogation du pape Jean-Paul II dès son premier voyage en France : « France, fille aînée de l’Eglise, est-tu fidèle aux promesses de ton baptême ? »

La troisième bougie qui se consume au Mesnil-Saint-Loup est la plus importante… Celle de la Charité. La question que je voudrais vous poser, chers pèlerins, est la suivante : « Votre cœur, au terme de cette marche religieuse de trois jours, brûle-t-il de l’amour même du cœur de Jésus ? Pour vous aider à demander d’un cœur ardent et généreux, je veux maintenant rappeler ceux qui marchaient avant vous, non pas au Moyen-Age, ni au temps de Péguy, mais depuis 25 ans. Ne pouvant les citer tous, je pense ce soir, à la foi intrépide et entière d’un Jean, le père tranquille ; à l’espérance d’un François-Xavier, notre ancien président, à celle d’un abbé Jean-Michel qui, comme certains d’entre nous, a traversé cette terrible crise dans l’Eglise en souffrant beaucoup mais en gardant le regard fixé vers les choses d’en haut comme Notre-Dame de la Sainte Espérance. Mais je pense surtout, en cette cathédrale à une petite pèlerine anonyme et qu’aujourd’hui toute la France connaît. Jeanne-Marie, donnes-moi, donnes-nous l’Amour qui te faisait écrire quelques jours avant ton sauvage assassinat : « Jésus, c’est Lui le plus important. Jésus, je Te remercie parce que tu as été crucifié pour nous sauver. Jésus, s’il Te plait, donnes-moi la force d’être bonne, de faire BEAUCOUP DE SACRIFICES et de rester dans la joie. Merci Jésus ! »

Ches enfants, chers pastoureaux, chers jeunes, Jeanne-Marie a marché avant vous, avec vous sur cette route de foi, d’espérance et de charité. Et sainte Jeanne d’Arc, cette figure si pure et si belle que vous aimez invoquer… à 19 ans, avait terminé sa mission, elle avait sauvé la France.

Chers jeunes, n’attendez pas d’être VIEUX pour remplir la mission que Dieu vous confie. L’année dernière, Son Excellence Mgr Breton vous a appelés à répondre généreusement à l’Appel du Seigneur. Quelques-uns l’on fait. Ne trouvera-t-on pas, parmi vous, les prêtres dont l’Eglise – surtout en Europe – a tant besoin, les religieux et les religieuses qui, par toute leur vie, montrent le chemin du ciel à leurs contemporains, les chefs que nos pays d’ancienne chrétienté appellent de tous leurs vœux.

LEVEZ-VOUS, chers jeunes… Dites NON au système et répondez à votre vocation. Si le Seigneur vous a attirés sur cette ROUTE d’Amour, c’est pour participer à une Nouvelle Pentecôte. Vous êtes la Génération-Chartres !

L’Eglise et nos nations attendent de vous qui êtes associés à cette grande aventure contemporaine de la Pentecôte une réponse à l’Amour du Christ.

Pour cela, chers jeunes et vous tous, prêtres, séminaristes, religieux, religieuses, et adultes de notre pèlerinage, prenez Marie dans vos vies.

C’est vers Elle que je veux me tourner au terme de ces 25 pèlerinages et à l’aurore de 25 suivants pour Lui exprimer, avec mon cœur de prêtre, au nom de tous ceux qui depuis 25 ans ont marché derrière Elle, OUI, Lui exprimer un immense et filial MAGNIFICAT.

Je vous invite, pèlerins de chrétienté, pèlerins de Notre-Dame, à ne JAMAIS quitter la main de Marie, à ne JAMAIS abandonner la prière quotidienne à Marie. Avec tous les grands amoureux de Marie, avec saint Bernard, avec saint Louis Marie Grignon de Montfort, avec le Père Maximilien Kolbe, avec Jean-Paul II, je vous invite à redire à Notre-Dame dans le secret de votre cœur : « Monstra te esse matrem ». Montrez-nous, O Marie, que vous êtes notre mère, la mère de nos cœurs, la mère de notre jeunesse et de nos enthousiasmes, la mère de nos familles, la mère de nos patries, la Mater Ecclesiae. Vous êtes, O Marie, pour nous et pour toujours : Notre-Dame de la Sainte Espérance.

Abbé François POZZETTO
Aumônier général de Notre-Dame de Chrétienté




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