Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.
« Je suis venu allumer un feu sur la Terre, et quel est mon désir, si ce n’est que ce feu se répande ? » (Luc 12, 49)
Chers pèlerins, ce feu de l’Esprit-Saint, reçu par les apôtres au jour de la Pentecôte, c’est vous qui le recevez aujourd’hui : dans la puissance d’un vent violent, Dieu intervient dans le monde, il intervient dans vos vies et descend sur chacun d’entre vous. Ce feu invisible de l’Esprit vient brûler dans nos âmes pour nous libérer des chaînes de la crainte, de la médiocrité, et du péché. Comme les apôtres, brûlants du feu de l’amour divin, nous aussi nous sortirons alors vers le monde pour prêcher Jésus-Christ, pour y annoncer la victoire de Dieu sur le mal, et pour répandre autour de nous ce feu de Dieu. Ils étaient douze, vous étiez 12.000 il y a peu, vous êtes désormais 16.000, et demain vous serez bien plus encore ! Le monde s’étonne, les médias s’effraient, les indifférents restent bouche bée en vous regardant passer au milieu des villes et sur les chemins de Beauce… Quelle est donc, se demandent-ils, cette flamme qui brûle dans le cœur de la jeunesse catholique de France pour la mener sur les routes de Chartres, et qui la mènera demain bien plus loin encore ? Quel est cet incendie qui se propage dans le monde, qui convertit les cœurs, qui renverse les puissants et qui comble de biens les affamés ? Il est temps de leur expliquer, chers pèlerins, il est temps de leur révéler ce qui nous anime, ce qui est notre raison de vivre, notre raison d’être : ce feu de l’Esprit-Saint, c’est la lumière de la vérité, c’est le brasier de l’amour de Dieu, c’est le feu du sacrifice.
Chers pèlerins, faire brûler dans vos âmes le feu du Saint-Esprit, c’est en effet d’abord être une lumière qui brille dans l’obscurité du monde. Car le feu de la Vérité, c’est Dieu lui-même. Souvenez-vous du buisson ardent, qui brûlait sans se consumer sur le Mont Horeb, et dans lequel Moïse distinguait la voix du Tout-Puissant (Ex 3, 1-7). Si Dieu se présente aux hommes comme un feu crépitant, c’est parce qu’il veut illuminer de son enseignement les recoins les plus sombres de l’humanité. En effet, « Dieu est lumière, et il n’y a point en lui de ténèbres » (1 Jn 1, 5). Il veut brûler dans nos intelligences pour les éclairer, et puis les faire resplendir au loin pour guider ainsi les voyageurs perdus dans les ténèbres. Il veut faire de vous des phares dans la tempêtes, des lueurs pleines d’espoir dans la tristesse et la confusion de nos contemporains. Vous êtes, oui, vous êtes cette lumière du monde (Mt 5, 14) !
Et si par malheur la lumière de la foi catholique s’amenuise ou qu’elle pâlit, c’est le monde entier qui sombre dans l’obscurité et le chaos. Il est donc de votre responsabilité de rester fidèles, quoi qu’il en coûte, à cette clarté resplendissante de la Vérité divine. Ne laissez aucune compromission, aucun aveuglement, aucune séduction, diminuer cet éclat que vous portez par votre foi, et dont le monde a tant besoin. Le feu de la Vérité ne laisse place à aucun compromis. La Vérité, oui, il faut oser le dire, la Vérité est intolérante. Ce que Dieu nous a enseigné et ce que l’Église nous transmet, ce que la nature nous donne, tout cela demeurera, même si les hommes cherchent à l’effacer ou à le détruire : notre foi en la divinité du Christ, en la sainteté de l’Église, en la présence réelle dans l’eucharistie, notre foi dans l’indissolubilité du mariage chrétien, dans la valeur de la vie humaine de la conception à sa fin naturelle, dans l’immoralité des pratiques contre nature, ces vérités fondamentales de notre foi sont intransigeantes, elles ne tolèrent aucune négociation. Bien sûr, c’est à chacun d’entre nous de présenter ces vérités avec douceur, avec nuances, avec compréhension, patience et subtilité. Mais l’on veut nous faire croire que la vérité divine devrait plier face aux exigences du monde, qu’elle devrait s’adapter et se taire devant les modes, les caprices et les puissants lobbys. Il n’en est rien. Au contraire, la vérité de notre foi est un roc inamovible, une citadelle imprenable – et celui qui y reste fermement attaché ne tremblera pas : il ne se laissera jamais emporter par les flots de la bien-pensance ou de la décadence, mais il demeurera une lumière qui brille dans les ténèbres.
Le feu de l’Esprit-Saint répandu à la Pentecôte, chers pèlerins, c’est ensuite ce foyer brûlant du Sacré-Cœur de Jésus, cet amour divin qui brûle dans le cœur de l’homme-Dieu et qui déborde dans chacune de nos âmes pour les embraser, les réchauffer, les modeler à sa ressemblance. Ce feu d’amour purifie nos âmes, il y redresse ce qui est tordu, il y réchauffe qui est trop froid, il affermit ce qui est trop souple, il guérit ce qui est blessé. « Dieu a tant aimé le monde » (Jn 3, 16) : cet amour du Christ pour les hommes est la source de toute charité, de tout véritable amour. Car Dieu nous a aimé le premier (1 Jn 4, 19), et il attend que le feu de notre amour brûle en retour. Oui, chers pèlerins, sommes-nous capables de crier à tue-tête aujourd’hui, de témoigner à la face du monde, dans notre école, notre université, sur notre lieu de travail, que nous aimons Dieu plus que tout, et que c’est cet amour qui nous rendra victorieux ? Nous sommes en effet dans le monde d’aujourd’hui les nouveaux bâtisseurs de la civilisation de l’amour. La chrétienté n’est pas, il faut le répéter, une culture parmi d’autres, c’est la civilisation ultime, qui élève l’homme parce qu’elle vient de Dieu. C’est cette civilisation de l’amour qui a renversé les barbaries païennes, et qui a construit l’Europe, avec ses monastères et ses cathédrales, avec son attention envers les plus faibles et avec son génie intellectuel, avec les plus brillants des artistes et les plus fervents des paysans. C’est l’amour de Dieu qui a construit ce monde dont nous sommes les héritiers, et qu’il nous faut désormais redresser de la ruine : il n’y a que le feu de l’amour divin, celui-là même qui brûlait dans le cœurs de nos ancêtres, qui renouvellera ce monde, qui lui donnera une vie nouvelle, qui rebâtira des cathédrales, qui réduira à néant les nouveaux paganismes et les nouvelles barbaries qui nous menacent.
Mais, chers pèlerins, ouvrons les yeux, soyons lucides : nous sommes loin d’être vainqueurs. Car non seulement la civilisation chrétienne a disparu, mais, plus grave encore, ce feu de l’amour divin menace de s’éteindre dans nos propres cœurs. L’amour, en effet, est tellement dévoyé, tellement humilié, qu’il est même presque corrompu dans le cœur des fidèles ! Le monde a tellement défiguré ce noble amour divin en le réduisant à un sentiment, à une recherche du plaisir, à une satisfaction égoïste de soi-même que sa grandeur et sa transcendance semblent nous échapper. J’en appelle à votre responsabilité, vous qui êtes si jeunes et plein d’avenir et qui devrez construire demain cette civilisation de l’amour : soyez les croisés de l’amour véritable ! Cessez d’en parler pour n’importe quoi ou avec n’importe qui, mais respectez-le en vous-même et dans les autres. Ne jouez pas avec l’amour, ne le déguisez pas selon vos caprices ou selon vos passions, de trichez pas avec lui, car vous en serez les premières victimes, malheureuses. L’amour est en effet une chose sérieuse, qui appelle le sacrifice, le don de soi, la responsabilité, l’engagement, la fidélité, et même l’éternité ! Croyez en l’amour, oui, donnez-vous pour lui, avec générosité et pureté, mais croyez dans le seul amour qui en vaut la peine : l’amour de Dieu et l’amour du prochain qui en découle. Tout ce qui s’oppose à Dieu et à sa loi n’est qu’une parodie de l’amour, qui mène à la tristesse et au désespoir. Mais si vous rallumez dans vos âmes, au contraire, la braise qui brûle sous la cendre, si vous faites s’enflammer à nouveau l’amour divin reçu dans la grâce de votre baptême, alors vous resplendirez, vous flamberez d’un éclat nouveau, et vous embraserez le monde tout autour de vous. C’est ainsi que vous serez les bâtisseurs, comme nos ancêtres, de cette civilisation de l’amour, de l’amour chrétien qui sourit et qui chante, qui espère et qui rayonne. Car il ne faudrait pas non plus que vous deveniez de ces chrétiens aigris qui condamnent sans cesse, qui donnent des leçons ou qui se prennent pour de tristes inquisiteurs, des rabat-joie. Soyez attachés à la grande Tradition de l’Église par amour de Dieu et par amour de votre prochain, soyez guidés sans cesse par la charité qui est le signe grâce auquel on reconnait les véritables disciples du Christ (Jn 13, 35).
Le feu du Saint-Esprit qui inonde nos âmes en cette fête de la Pentecôte, chers pèlerins, c’est enfin le feu du sacrifice. Dans l’Ancien Testament, l’holocauste est le sacrifice rituel, réalisé dans le Temple aux fêtes les plus solennelles, dans lequel la victime offerte est totalement consumée par le feu sur l’autel (Lev 1, 3). Ce sacrifice était une image, une annonce du don total de Jésus-Christ sur la croix, qui s’offre en sacrifice pour nous, et qui se laisse consumer totalement par le feu de son amour. Pendant la sainte Messe, de la même façon, lorsque nous recevons la sainte communion, nous consommons cette hostie sainte et sans tâche, cette victime offerte sur la croix, le corps et le sang de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Nous devenons ainsi en quelque sorte l’autel même du sacrifice, sur lequel se consume Jésus-Christ au feu de la charité qui brûle dans notre âme. Voilà comment le mystère de la messe, le mystère de l’Église, sont nés en cette fête de la Pentecôte, sous le feu de l’amour divin. La messe n’est en effet rien d’autre pour nous que cette si grande preuve d’amour de Dieu pour les hommes. Elle n’est ni une simple réunion des chrétiens, ni un concert de louanges, et moins encore un spectacle distrayant : tout cela est bien trop humain. Si nous aimons la sainte messe plus que tout au monde et que nous voulons la défendre de toutes nos forces, c’est parce qu’elle est le sommet de l’infinité de l’amour divin. Voilà aussi pourquoi nous sommes tellement attachés aux rites et à la sacralité de la messe traditionnelle : parce que c’est le meilleur service, le plus grand signe d’amour que nous pouvons rendre au monde et à l’Église ! Chers pèlerins, si nous sommes ici aujourd’hui, ce n’est pas parce que nous serions meilleurs chrétiens que les autres, non, nous sommes peut-être les plus médiocres et les plus pécheurs. Mais nous avons reçu cette grâce particulière, celle de saisir l’importance de la ritualité, de la sacralité et de la Tradition. Ne pas les défendre et ne pas les transmettre serait pour nous être infidèles à la grâce, à l’amour, ce serait trahir ce don incroyable que le cœur de Dieu a voulu nous transmettre ! Nous sommes les gardiens de la Tradition, parce que c’est la mission que Dieu nous a confiée pour l’Église, par l’Église et dans l’Église.
Chers pèlerins, laissez donc l’Esprit-Saint allumer dans vos cœurs le feu de son amour : et partez à la conquête du monde, à la conquête des âmes, pour y répandre ce feu que Jésus-Christ est venu allumer sur la Terre. Par votre fidélité à la Vérité, par la manifestation de votre charité et de l’amour authentique, par votre attachement à la sainte liturgie de l’Église, vous transformerez le monde comme les apôtres au jour de la Pentecôte. Une foule d’ennemis voudront vous faire taire, vous humilier et tenteront d’éteindre ce feu divin qui brûle désormais dans vos âmes. Les communistes, les Francs-Maçons, les mondialistes, les wokistes, les libéraux, les progressistes, les sans Dieu et ceux qui adorent de faux dieux, les hérétiques et les schismatiques, les socialistes, de droite comme de gauche, ils tenteront d’éteindre cet incendie de l’amour comme ils l’ont fait par le passé. Car s’ils « ont persécuté le maître, ils vous persécuteront aussi » (Jn 15, 20). Mais nul ne pourra éteindre ce feu de l’amour. Vous résisterez, vous vous relèverez sans cesse, vous ressusciterez avec Jésus-Christ, car désormais rien ne peut vous troubler, rien ne peut vous atteindre, rien ne peut stopper cette civilisation de l’Amour qui enflamme les cœurs comme un feu qui se répand sans jamais s’arrêter. Vous serez, espérons-le, la génération qui verra la France et l’Europe redevenir chrétiennes. La tâche sera rude, mais vous serez à la hauteur, car ce feu divin qui brûle dans vos âmes ne s’éteindra pas : il grandira jusqu’à l’éternité.
Que Notre-Dame de Chartres guide nos pas jusqu’à elle, qu’elle nous protège et nous bénisse.
Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.