Parents et éducateurs de la Très Sainte Vierge Marie
Ce dernier jour de pèlerinage est placé sous le patronage de Sainte Anne et Saint Joachim, les parents et éducateurs de la Très Sainte Vierge Marie. On chercherait en vain, dans le Nouveau Testament, la mention de leur existence. Tout ce que l’on sait d’eux provient des évangiles apocryphes, c’est-à-dire des textes que l’Église n’a pas retenus dans le « canon » des Écritures Saintes, parce qu’elle considère que leur origine est incertaine et qu’ils sont entachés de goût pour le merveilleux.
Ces apocryphes ont inspiré de très nombreux auteurs, notamment le dominicain Jacques de Voragine (1228-1298), qui finira archevêque de Gênes, dont la « Légende Dorée », écrite dans un style simple et imagé, fut une mine d’inspiration pour les prédicateurs et de nombreux artistes, et permet d’expliquer à elle seule la plupart des bas-reliefs de nos cathédrales.
On peut également citer comme source beaucoup plus récente les révélations dont bénéficia la Bienheureuse Anne-Catherine Emmerich (1774-1824), une religieuse allemande, qui fut une grande mystique.
I. UNE EXEMPLAIRE CONFIANCE EN DIEU, MISE A L’EPREUVE PAR LA STERILITE, ET RECOMPENSEE PAR LA NAISSANCE DE MARIE
Ces différentes sources racontent l’histoire d’un berger de la tribu de Juda, et donc de la descendance de David, nommé Joachim, qui était marié depuis vingt ans à une femme de la même tribu, appelée Anne dont la sœur Hisménie donna le jour à Élisabeth, mère de Jean-Baptiste. Ils n’avaient pas d’enfant.
Un jour que Joachim était monté au Temple de Jérusalem pour faire son offrande au Seigneur, le prêtre le repoussa sous le prétexte qu’étant privé de progéniture, il n’était pas béni de Dieu. Profondément humilié, Joachim n’osa rentrer chez lui et s’en alla vivre avec ses troupeaux, dans le jeûne et la prière.
Pendant son absence qui dura cinq mois, Anne, son épouse, qui était sans nouvelle de lui, se lamentait. Un jour qu’elle était en prière et rappelait à Dieu le vœu qu’elle lui avait fait, au début de son mariage, de lui consacrer un enfant, l’ange du seigneur lui apparut et lui promit « une descendance qui ferait l’admiration de toutes les nations ».
De son côté, Joachim reçut la visite d’un ange qui lui ordonna de revenir à Jérusalem où il retrouverait son épouse, et il lui annonça que sa femme allait concevoir une fille qui vivrait dans le Temple. Obéissant à l’injonction céleste, Anne et Joachim se retrouvèrent à la Porte dorée de Jérusalem et quelques mois plus tard, Anne mis au monde une fille qu’ils appelèrent Marie.
II. UNE PERIODE TRES INCERTAINE ET UNE DESCENDANCE CONTROVERSEE
Nombre d’auteurs ont raconté la mort de Sainte Anne, tel Jean-Thomas de Saint-Cyrille qui écrit : « Sainte Anne s’endormit d’un paisible sommeil, en présence de Jésus et de Marie, et on ne saurait imaginer une mort plus douce ». D’après les visions de Marie d’Agreda, morte en 1665, Anne aurait compté parmi les morts dont parle l’évangile selon Saint Matthieu, qui ressuscitèrent au moment précis de la mort du Christ.
Le tombeau de Saint Joachim se montre encore aujourd’hui aux pèlerins de Terre Sainte, dans l’église du Saint-Sépulcre de Notre-Dame, dans la vallée de Josaphat, au côté droit du grand autel, avec celui de son épouse Sainte Anne et de Saint Joseph, l’époux de la Vierge Marie.
Le corps de Saint Joachim aurait été transféré ultérieurement à Jérusalem et une partie de son chef serait conservé précieusement à Cologne, dans l’église des Maccabées. Selon une autre tradition, transporté en France au 1er siècle, le corps de Sainte Anne est conservé dans la crypte de l’église d’Apt, en Provence où il fut découvert en 792, de façon miraculeuse, en présence du Roi Charlemagne.
III. LA VIE DE MARIE TEMOIGNE DE LA QUALITE DE L’EDUCATION QU’ELLE A REÇUE DE SES PARENTS
Anne et Joachim incarnent la Vertu théologale d’Espérance dans un monde troublé et en attente. Ils espèrent en un Dieu qui se soucie de son Peuple. Ils ont confiance dans ses promesses. Ils ignorent que Marie, leur fille, par une grâce de prévenance, est exempte du péché originel.
Ils ont donc veillé sur les conditions matérielles, la formation physique et morale et l’éducation appropriées à leur fille qui ont permis à la Vierge Marie de répondre PARFAITEMENT à sa vocation : trouver sa joie dans l’obéissance aux demandes du Seigneur.
Et, s’il est possible qu’ils aient confié leur fille Marie au Temple pour qu’elle y reçoive la meilleure éducation, il n’en reste pas moins certain qu’ils n’ont en rien contrarié l’éducation qu’elle y a reçue. L’auraient-ils voulu, que Dieu ne l’aurait pas permis : il s’agissait de l’éducation de la mère du Fils de Dieu.
Pleine de Grâce
La Vierge Marie est « pleine de grâce ». Il n’y a pas d’obscurcissement de son intelligence à connaître et comprendre le Bien, et pas de faiblesse à le vouloir. Mais elle n’a pas, pour autant, une connaissance immédiate du Bien ; il lui faut l’apprendre. Elle ne met aucun obstacle à l’action de Dieu en elle, mais elle a un corps qui doit se former et être éduqué. De même, son intelligence doit être instruite et conduite à la sainteté. Par l’étude de l’Écriture Sainte, elle s’est intégrée, à la suite des filles d’Israël, dans l’espérance de la réalisation des promesses de Dieu.
Pleine de Sagesse
Marie est une enfant qui vit, qui prie, qui étudie. C’est une jeune fille pleine de sagesse. Elle aime Joseph, l’homme à qui elle est promise ; elle fait preuve de bon sens lorsqu’elle interroge l’ange de l’Annonciation: comment Dieu fera-t-il pour la rendre mère du Messie et respecter sa virginité ? Marie sait ce que savent les filles de son âge et de sa condition. À l’Annonciation elle comprend qu’elle a été choisie par l’Éternel ; elle n’est pas soumise, elle coopère librement, même si cela présente des risques et provoque des inquiétudes, parce que cette naissance semble contrevenir aux préceptes de la loi.
Humble et attentionnée
Une fois Joseph rassuré et après les manifestations extraordinaires de la naissance de Jésus, elle n’en tire aucune vaine gloire et ne cherche à en tirer aucun privilège : Marie garde en son cœur ce qu’elle sait. C’est une mère attentionnée au Nouveau-né, scrupuleuse à respecter les règles de la loi mosaïque pour elle et sa Famille, inquiète de son Fils lorsqu’Il est perdu au
Temple, soucieuse de bien l’éduquer et heureuse d’y parvenir, puisque l’Évangile précise qu’ « Il leur était soumis ».
Réaliste et Bienveillante
Marie n’est pas « quiétiste » : elle ne néglige pas les affaires temporelles, elle remplit son rôle de mère et d’épouse, quelles que soient les difficultés comme dans la fuite en Égypte.
Sensible et attentionnée vis-à-vis des jeunes mariés à Cana, elle conseille discrètement et se montre attentive aux signes donnés par son Fils.
Fidèle
Elle rejoint plusieurs fois Jésus dans Sa prédication et reste à l’écoute de Dieu. Au calvaire elle est là, Mère de douleurs.
Au Cénacle, elle se tient parmi les onze, comme une mère ; jusqu’à sa mort, sans doute à Éphèse, elle est fidèle aux Apôtres, qui la visitent fréquemment, comme de bons fils. La vie de la Vierge Marie témoigne de la qualité de l’éducation qu’elle a reçue de ses parents.
IV. LA GLOIRE DES AUTELS
Si la vie de Sainte Anne et de Saint Joachim est peu ou mal connue, en revanche le culte qui leur est réservé, à Sainte Anne plus particulièrement, est très répandu. Saint Joachim a été pris pour patron par les anciennes Confrérie de l’Immaculée Conception, en raison sans doute de cette manière de représenter le premier instant où Notre Dame reçu la vie. Une de ces Confréries existait à Paris, à la paroisse Saint-Séverin, en 1561.
Les plus anciennes mentions de Sainte Anne datent du Vème siècle. Une église édifiée à l’emplacement présumé de la naissance de la Vierge lui aurait été consacrée à Jérusalem ; l’Empereur Justinien aurait fait élever une basilique en son honneur à Constantinople, vers 550.
En Orient, sa fête est attestée depuis le VIème siècle, à Byzance, et fixée au 25 juillet. En Occident, la fête de sainte Anne ne se répand qu’au VIIIème siècle ; elle est célébrée le 26 juillet. En 1584, une bulle du Pape Grégoire XIII rétablit la fête de Sainte Anne, en l’étendant à l’Église universelle.
Pendant son pontificat, Paul VI décida de fusionner les fêtes de Sainte Anne et de Saint Joachim qui sont célébrées le 26 juillet.
La dévotion à sainte Anne n’a commencé à se répandre en Occident qu’à l’époque des croisades, lorsque des reliques furent rapportées de Constantinople ou de Terre Sainte et dispersées dans nombres de villes européennes : Brême, Mayence, Vienne, Ancône, Naples, Bologne…, et en France : l’abbaye d’Ourscamps dans l’Aisne, Paris, Sainte-Anne d’Auray, Cluny, Rouen, Lyon, Angers et…. Chartres.
C’est ainsi que La Cathédrale de Chartres reçu la tête de la Sainte comme le rapporte le Cartulaire de Notre-Dame de Chartres, qui précise que « la tête de la mère fut reçue avec une grande joie dans l’église de la fille ». On notera par ailleurs, en contemplant cette cathédrale, que la statue qui orne le trumeau du porche nord dans le portail central et que la verrière consacrée à Sainte Anne et la Vierge, témoignent de cette vénération pour celle qui est considérée comme le modèle de la maternité et l’idéal à imiter pour les mères et les grands-mères.
Il y a peu d’églises où il ne se trouve une chapelle du nom de Sainte Anne, tant est grande la dévotion envers la mère de la Très Sainte Vierge. Et qui ne connaît le fameux pèlerinage de Sainte-Anne d’Auray et l’attachement profond des Bretons à leur sainte patronne ?
Que Sainte Anne et saint Joachin, si proches de Jésus et de Marie, nous aident, au cours de cette dernière journée de pèlerinage, à bien mesurer l’importance du défi éducatif auquel nous sommes aujourd’hui confrontés et à assumer nos responsabilités vis-à-vis des enfants dont nous avons ou aurons un jour la charge.
Et, pour les en remercier, associons- nous à cette belle prière que leur adressait Saint Jean Damascène :
« O couple trois fois heureux de Saint Joachim et de Sainte Anne ! Vous avez à notre reconnaissance un droit imprescriptible : grâce à vous, nous avons pu offrir à notre Dieu le don le plus sensible à son cœur, une mère vierge, la seule mère digne du Créateur ».