Abbé Matthieu Raffray, « Breton, retrouve la foi de tes pères »
Pèlerinage Feiz e Breizh – 28 septembre 2024 –
Pèlerinage Feiz e Breizh
Église saint Pierre, Languidic – Samedi 28 septembre 2024
Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit – Ainsi soit-il.
Breton, réveille-toi ! Prends ton bâton de pèlerin pour retrouver la foi de tes pères ! Que tu
sois Breton de sang ou Breton de cœur, lève-toi, ce matin, et avance sur les chemins de ton
pays pour redonner à cette patrie la ferveur qui faisait autrefois sa fierté. Retrouve la foi du
paysan Léonard, qui s’arrêtait à l’église du village en rentrant d’une journée de labeur,
retrouve la dévotion du pêcheur malouin, qui se confiait à saint Yves en partant pour les
pêches d’Islande, retrouve la piété de la mère de famille, à Brest, à Pontivy ou à Nantes, qui
priait le chapelet avec ses enfants le soir avant qu’ils aillent se coucher. Redonne à la
Bretagne sa splendeur d’autrefois, avec ses pardons et ses processions, avec ses
bannières, ses étendards, ses milliers de chapelles et ses innombrables calvaires. Fais
renaître sur cette terre bénie les vocations nombreuses qui évangélisèrent la France et le
Monde. Oui, il est urgent que la Bretagne catholique renaisse, qu’elle ressuscite après un
trop long sommeil : parce que cette terre de granit, fouettée par les flots indomptables de
l’océan, est capable de redonner vie à la Chrétienté dans tout l’Occident ! Oui, c’est de notre
extrémité occidentale de l’Europe, que peut se lever une nouvelle génération de chrétiens
qui commence ici la Reconquista, et relève par sa ferveur et sa piété une nouvelle Chrétienté
dans toute l’Europe.
Mais, me direz-vous, Monsieur l’abbé, par où commencer ? Et bien je vais vous le dire, c’est
très simple, et nous allons le mettre en pratique dès aujourd’hui. Le pèlerin qui part pour
marcher, comme vous ce matin, a besoin de trois choses indispensables : il lui faut un but à
viser – pour nous, c’est sainte Anne d’Auray ; il lui faut un chemin à suivre – pour nous, ce
seront les sentiers du Pays Vannetais ; et il lui faut enfin une besace à porter, un sac à dos
léger. Eh bien, chers pèlerins, dans le pèlerinage de la vie, et dans l’œuvre de la
rechristianisation de nos terres bretonnes, il en va de même, il nous faut ces trois choses !
Tout d’abord, il nous faut un but à viser : ce but c’est le Ciel, c’est l’éternité.
Alors en vous élançant sur les routes ce matin, n’ayez rien d’autre en tête : visez le Ciel !
Laissez de côté vos préoccupations, vos épreuves et vos inquiétudes quotidiennes, et
concentrez-vous sur cet objectif fondamental. Nous aurons deux jours pour nous rapprocher
de Dieu, pour prier, souffrir, chanter, pour nous détacher du monde et monter d’un pas, d’un
grand pas, vers le Ciel. Il faudra pour cela nous confesser, pour jeter derrière notre épaule le
fardeaux de nos péchés, comme dit le psaume, et avancer résolument sur ce chemin du
Ciel. Et quelque soit notre allure, le rythme de nos pas, une chose est sûre : il ne faudra pas
quitter des yeux les tours de la Basilique, pour être sûr de parvenir au but que nous nous
sommes fixé.
Dans la vie chrétienne, il en va de même : peu importe le poids que nous avons à porter, peu
importe le point dont nous partons, ce qui est essentiel, c’est de garder en vue l’objectif visé,
c’est-à-dire la béatitude éternelle. Cela semble si évident pour un chrétien, mais combien de
nos contemporains vivent totalement indifférents à Dieu, tels des animaux, destinés à
disparaître pour l’éternité après quelques années d’une pénible vie terrestre ? Il suffit de
regarder le nombre de bretons qui font du vélo le dimanche matin, ou qui déambulent
hagards dans les rayons des supermarchés. Ils courent après des fantômes, ils emplissent
leurs vies de détritus et de balivernes. Il faut au contraire leur prêcher l’éternité, leur parler du
ciel et de l’enfer, leur donner de grands désirs, leur montrer que nous valons plus que les
produits de consommation dont on nous abreuve.
Vous l’avez compris : pour que la Bretagne catholique renaisse, il faut commencer par viser
haut, viser ce but céleste. Ce ne sont ni les manœuvres politiciennes, ni les calculs
électoraux, ni les manifestations et les tracts régionalistes qui redonneront à notre pays sa
splendeur : pour qu’il retrouve son âme, il faut que ses hommes retrouvent leur foi, il faut
viser Dieu, le paradis, l’éternité, les grands idéaux. Redonner à la Bretagne son souffle divin,
sa transcendance, faire vivre le divin au fond de l’âme des bretons, au plus profond de
chacune de nos âmes.
Une fois le but fixé, il faudra nous mettre en chemin.
Car la bonne volonté ne suffit pas, et pour atteindre notre but, il nous faudra nous engager
sur des chemins rugueux, escarpés, parfois périlleux. Mais quels chemins arpenter ? Nous
emprunterons les chemins que la multitude des saints bretons ont déjà foulés de leurs
propres pieds, les routes qu’ils nous ont tracées, l’exemple qu’ils nous ont montré. Que ce
soient les saints fondateurs de nos diocèses : saints Brieuc et saint Malo, saint Sansom à
Dol, et Tugdual à Tréguier, Pol-Aurélien à Saint-Pol de Léon, Corentin à Quimper et Paterne
à Vannes, ou encore ceux qui ont défrichés les campagnes et fondé nos villes : Ronan,
Efflam et sa femme Enora, Briac, Lunaire, Maclou, Melaine, Gonnery, Gildas, ou encore
Idunet, Tugen et Houardon, les fondateurs de nos abbayes millénaires, sainte Eliboubane
l’ermite, ou Gunthiern, Yben et Guénolé, Armel, Magloire, Clair et Méen… Les anciens
recueils affirment qu’il y a en Bretagne 7777 saints ! La foule des saints bretons est plus
nombreuse que nous aujourd’hui ! Et cette litanie est comme un défilé des saints qui nous
invitent à les suivre, qui nous incitent à entrer dans leurs pas pour nous aussi défricher,
conquérir, bâtir des villes et des monastères, pour édifier la chrétienté partout sur notre sol.
Alors vous, jeunes bretons, qui portez avec fierté ces prénoms parfois un peu… exotiques,
comme vos saints patrons qui ont fait la gloire de la Bretagne, prenez leur suite, suivez leurs
traces, imitez-les : nos terres étaient autrefois arides, farouches, inhospitalières, peuplées de
méchants païens sourds à la parole de Dieu. Aujourd’hui le monde moderne est tout aussi
méchant et vicieux, il est comme imperméable à la grâce : il nous faut comme nos ancêtres
défricher avec patience, édifier avec courage, lutter contre le mal, résister au
découragement, commencer petitement par de solides fondations, des familles
profondément chrétiennes, qui donnent des vocations nombreuses, des paroisses vivantes
et missionnaires. On nous mettra des embûches, on nous tendra des pièges. Ceux-là même
qui devaient nous soutenir et nous encourager nous laisserons tomber, ils nous trahirons, ils
abanderons le combat, ils détruirons ce que nous aurons péniblement édifié. Mais nous nous
relèverons, nous recommencerons avec patience, quel qu’en soit le prix, dans les granges
ou les forêts, à édifier dans le cœurs de nos enfants la foi catholique, la foi de toujours, la foi
de nos pères !
Nous naviguerons donc joyeusement sur ces chemins de Bretagne, avec la foule des
bâtisseurs des premiers siècles, ceux qui sont arrivés par la mer sur leurs fameuses barques
de pierre, mais aussi avec le bienheureux Charles de Blois, ce duc de Bretagne mort en
1364 que nous fêtons aujourd’hui, et dont la charité, la bienveillance et le soin envers les
pauvres est aujourd’hui encore un exemple pour chacun de nous. Nous suivrons le chemin
de conversion de Pierre Le Gouvello de Keriolet, le pénitent breton qui de démon devint un
grand saint, et dont la tombe se trouve aujourd’hui encore dans la basilique Sainte-Anne.
Nous offrirons nos fatigues et nos pénitences à Sainte Anne, justement, la bonne mère de
tous les bretons, dont nous célébrons encore cette année les 400 ans des apparitions à
Yvon Nicolazic. Et nous prierons bien sûr enfin celle dont nous voulons prendre la foi pour
modèle, la Très Sainte Vierge Marie : en tête de cette ribambelle des saints, c’est elle qui
nous montre le chemin vers le Christ, c’est elle qui nous ouvre les portes du Ciel, qui nous
introduit auprès du Père éternel en nous donnant son divin Fils.
Le but est fixé. Le chemin est tracé. Il nous reste à saisir notre besace avant de nous mettre
en route.
Mais que prendre ? Qu’emporter avec nous ? De quoi avons-nous besoin sur ce chemin de
conversion et de sainteté ? Nous n’emporterons que l’indispensable, comme le petit
Grégoire du pays chouan : une gourde pour boire, une vierge d’ivoire, sans oublier notre
fusil, pour chasser la Perdrix ! En effet, l’eau et la nourriture indispensables dont nous aurons
besoin sur ce chemin de la reconquête, ce sont les sacrements : l’eau de la grâce et le pain
eucharistique, qui nous donneront les forces pour aller de l’avant, pour poursuivre notre
route, pour nous relever si nous faiblissons. Notre vierge d’ivoire, ce seront les grains de
notre chapelet, toujours à la main ou dans la poche, récité tout le long du chemin comme
pour consacrer à la Vierge Marie chacun de nos pas, chacune de nos pensées, chacun de
nos détours. Notre fusil, enfin, ce ne sera pour l’instant rien d’autre que notre bonne volonté,
notre courage, notre détermination et notre générosité. Oui, quoi qu’il en coûte, nous
parcourrons ces chemins de la reconquête, de la rechristianisation. Nous rendrons la
Bretagne à Dieu et à la Chrétienté. Nous commençons aujourd’hui le grand retour de notre
Roi, le grand retour de notre foi.
Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit – Ainsi soit-il.