Quand on te demande « En fait c’est quoi le pélé de Chartres ? », t’as envie de répondre :
Chartres, c’est te lever à 5h du mat’ pendant trois jours, sans avoir tes 7h de sommeil recommandées pour bien se reposer.
Chartres, c’est retrouver des personnes que tu n’as pas vues depuis dix ans et que tu n’aurais jamais pensé croiser là.
Chartres, c’est arriver à chaque bivouac sous les applaudissements des bénévoles qui ont travaillé toute la journée pour construire une petite ville uniquement pour un soir, pour que tu puisses te laver, dîner tranquillement et te reposer.
Chartres, c’est aller chercher ta soupe et ton eau chaude le soir au coin cuisine.
Chartres, c’est te sentir tout propre après t’être lavé autour de lavabos bondés et avec un débit d’eau très faible.
Chartres, c’est avoir le cafard au bivouac le dimanche soir parce que tu sais que le pélé se termine le lendemain.
Chartres, c’est passer sans transition le dimanche soir d’un bivouac bruyant, grouillant de monde, à une adoration silencieuse, coupée du monde. C’est vivre à ce moment-là un tête-à-tête avec Dieu alors que tu es entouré de milliers de personnes.
Chartres, c’est payer son inscription, le transport pour aller à Paris et revenir chez soi à la fin, sa nourriture pour trois jours, son matos de marche, tout ça pour repartir avec des ampoules aux pieds et des affaires définitivement perdues. Mais c’est ne pas regretter un seul instant parce que tu sais que tu as gagné bien plus : des souvenirs pour la vie et des grâces à foison.
Chartres, c’est souffrir pendant trois jours de la fatigue et des pieds pour un Dieu qui a souffert le martyr pour te sauver.
Chartres, c’est le « Ami pèlerin bonjour » à 5h du mat’ pour te réveiller et qui te dit à 5h10 que tu n’es pas encore sorti de ta tente et que ton sac n’est pas encore rangé dans les camions. Et c’est toi qui te dis qu’il est gonflé parce que t’es en train de t’activer alors que t’as mal aux pieds et que t’as 5h de sommeil max derrière toi.
Chartres, c’est devoir retrouver ton sac et ta tente le soir au bivouac, au milieu de mille autres sacs et mille autres tentes identiques. C’est avoir du bol et les trouver tout suite et aider les autres à trouver les siens. Ou alors, c’est chercher pendant des heures, ne pas trouver tes affaires, aller aux objets trouvés et te rendre compte que quelqu’un a confondu son sac avec le tien.
Chartres, c’est porter le sac de celui qui n’arrive plus à avancer, c’est attendre avec ton ami à l’ordre de Malte pour qu’on s’occupe de lui, l’y laisser et devoir ensuite remonter la colonne pour retrouver ton chapitre. Et toi t’as pas la possibilité de monter sur les motos comme les prêtres, tu dois utiliser tes petits pieds déjà mal en point !
Chartres, c’est marcher en te disant que t’as quand même super mal aux pieds, lever la tête et voir un prêtre qui confesse devant ton chapitre. Alors, tu comprends que le prêtre a aussi mal que toi mais qu’il donne toute son attention à celui qui est en train de se confesser. Et tu retrouves d’un coup la force d’avancer.
Chartres, c’est apercevoir les flèches de la cathédrale le dimanche soir et reprendre un coup de boost grâce à ce moment.
Chartres, c’est rire avec tes amis, prier avec tes amis, manger avec tes amis, les connaître dans leurs moments de faiblesse et surtout découvrir leur force.
Chartres, c’est arriver à la cathédrale le lundi, se manger une dernière montée bien rude, sous un soleil de plomb mais continuer à chanter pour la dernière ligne droite.
Chartres, c’est assister à des offices célébrés selon le rite traditionnel. Grace a cette liturgie, tu touches du doigt le mystère de Dieu, tu t’élèves et tu comprends l’importance du sacré.
Chartres, c’est aussi des milliers de pèlerins dont une grande partie découvre le rite traditionnel. C’est les voir y adhérer complètement, reconnaître dans cette liturgie quelque chose qui les transcende et qui les rapproche de Dieu.
Chartres, c’est apprendre à connaître Dieu à travers un enseignement rigoureux et complet. C’est adhérer à une liturgie qui a forgé la chrétienté pendant des siècles, et être persuadé qu’elle doit continuer à le faire. C’est choisir de fonder son avenir sur la tradition.
Chartres, c’est d’abord avoir peur de ne pas tenir le coup, de ne pas réussir à faire les 100km entre Paris et Chartres. Et puis en arrivant à Chartres, c’est te dire que t’es pas si fatigué et que tu peux repartir pour trois jours.
Chartres, c’est les “Jubilate Deo” chantés dans le train du retour, les gares, et qui se perdent ensuite progressivement dans les couloirs du métro.
Chartres, c’est devoir expliquer le mardi en retournant au taf pourquoi tu as des cernes, la voix cassée et pourquoi tu boîtes (même si tu fais tout pour marcher normalement).
Chartres, c’est rentrer chez toi le lundi soir, avoir le cafard, vouloir y retourner et pour te consoler, poncer les réseaux de NDC, regarder le teaser du pélé, avoir des frissons et te dire qu’un an c’est long quand même avant de pouvoir recommencer.
Mais tout ça, ce sont des choses qui ne s’expliquent pas. Ces choses-là, elles se vivent, elles se ressentent, elles s’ancrent dans ton cœur et ton corps. Cette ambiance, tu n’arrives pas à la décrire, ces mille souvenirs qui restent gravés dans ta mémoire, tu ne sais pas comment les ordonner pour en faire une présentation claire.
Alors, tu lances dans l’élan missionnaire qui caractérise tous les pèlerins de chrétienté : « viens avec moi l’année pro et tu comprendras ce que c’est le pélé ». Et c’est à ce moment-là que tu remplis ta mission de chrétien : amener les gens à Dieu. Et c’est aussi à ce moment-là que tu ajoutes une préoccupation supplémentaire aux organisateurs, parce que tu ramènes la 16 001ème personne au pélé, celle pour qui il va falloir trouver une solution pour l’accueillir l’an prochain, elle et les 16 000 autres personnes en plus, ces personnes que chaque pèlerin enthousiaste comme toi, aura motivé à venir !