Chers pèlerins,
Pie XII, dans l’un de ses discours aux jeunes époux, leur indique que l’on va à Dieu soit par la contemplation de la nature, soit par la prière.
1. La prière en famille
La prière personnelle.
Pie XII évoque d’abord la prière personnelle : « Pour chercher Dieu, pour le trouver, il suffit que vous rentriez en vous-mêmes, le matin, le soir, à n’importe
quel moment de la journée (…). Vous verrez des yeux de la foi, dans l’intime de votre âme, Dieu toujours présent comme un Père d’immense bonté ». Et le Pape invite chacun à faire « chaque soir un bref examen de conscience ».
La prière en commun.
Mais, le Saint Père insiste aussi sur la prière en commun. Dans un autre discours, il en donne la raison : « Tous les chrétiens doivent sans négliger la prière
individuelle, accorder dans leur vie une place à la prière en commun, qui leur rappelle leur fraternité dans le Christ et leur devoir de sauver leurs âmes, non point isolés les uns des autres, mais dans la collaboration ».
Le texte évangélique qui est le fondement de la prière en commun est le texte de saint Matthieu 18, 20 : « Si deux d’entre vous s’accordent sur la terre (et ces deux qui doivent s’accorder, ne sont-ce pas tout particulièrement l’époux et l’épouse que Dieu a unis ?) Quelle que soit la chose qu’ils demanderont, ils l’obtiendront de mon Père qui est dans les cieux. Car là où deux ou trois sont rassemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux ».
La prière des époux.
Pie XII parle aussi, et de façon bien émouvante, de la prière des époux. « C’est donc une grande et fructueuse union que celle des époux qui se mettent à genoux, l’un à côté de l’autre, pour demander à Dieu de conserver, d’accroître et de bénir la fusion de leurs vies… Où donc leurs cœurs, leurs intelligences, leurs volontés se rapprocheront-ils, se pénètreront-ils dans une union plus profonde, plus forte et plus solide que dans la prière à deux, où une même grâce divine descend du ciel pour harmoniser toutes leurs pensées, leurs affections et leurs désirs ».
La prière en famille.
Et très logiquement on passe de la prière des époux à la prière en famille. Pie XII parle avec force : « Nous vous en supplions, chers jeunes époux, ayez à cœur de garder cette belle tradition des familles chrétiennes : la prière du soir en commun ». Quel en sera le contenu ? Pie XII donne trois indications :
- Implorer la bénédiction de Dieu.
- Honorer la Vierge Immaculée par le Rosaire.
- Lire une brève vie du saint du jour.
Un sanctuaire familial.
Puis le Pape indique la nécessité d’un petit sanctuaire familial : « Le centre de votre existence doit être le Crucifié ou l’image du Sacré-Cœur de Jésus : que le
Christ règne sur vos foyers et vous réunisse chaque jour autour de lui».
Le contenu de la prière.
Le bienheureux Jean-Paul II, dans « Familiaris Consortio » (n°61) développe de façon quasi-exhaustive le contenu de la prière en famille. Il ne se borne pas à la prière du soir. « Outre les prières du matin et du soir, sont à conseiller expressément… la lecture et la méditation de la Parole de Dieu, la préparation aux sacrements, la dévotion et la consécration au Cœur de Jésus, les différentes formes de piété envers la Vierge Marie, la bénédiction de la table, les pratiques de dévotion populaire ».
La dévotion populaire.
Jean-Paul II parle des pratiques de dévotion populaire. On peut y faire entrer les pèlerinages, ce que fait explicitement le Catéchisme de l’Église catholique (n°
2695). On peut penser à l’Angélus. On peut aussi penser à faire revivre ces coutumes chrétiennes de chrétienté, comme la prière pour les défunts.
L’éducation des enfants à la prière.
La prière familiale suppose une éducation des enfants à la prière. Familiaris Consortio (n° 59) dit excellemment que « l’exemple concret, autrement dit, le témoignage vivant des parents, est un élément fondamental et irremplaçable de l’éducation à la prière : c’est seulement en priant avec leurs enfants que le père et la mère pénètrent profondément le cœur de leurs enfants, en y laissant des traces que les évènements de la vie ne réussiront pas à effacer ».
Des parents chrétiens peuvent certainement s’aider de la pédagogie de la Sainte Vierge pour apprendre à leurs enfants à prier, et les enfants peuvent, de leur côté, entraîner des adultes à la prière (cf. Bernadette à Lourdes, les jeunes voyants à Pontmain et à l’Ile Bouchard).
2. La famille, église domestique
Si la famille est un lieu de prière et d’éducation à la prière, elle ne peut pourtant pas et ne doit pas rester close sur elle-même dans le domaine spirituel.
Pie XII invitait les jeunes époux à cette ouverture de la famille : «Mais pour vous unir l’un à l’autre davantage encore, voilà un chemin plus haut : le chemin qui vous conduit de votre demeure à celle qui est la maison du Père par excellence, votre chère église paroissiale ». Et le Saint Père insistait sur la communion : « Chaque fois que vous approcherez ensemble de la Table Sainte, dans l’union la plus intime de toutes, pour recevoir le Corps de Notre-Seigneur, ce très
Saint Corps, le lien le plus puissant… accomplira en vous, par des voies toutes divines, la pleine fusion de vos âmes ».
La famille doit donc s’ouvrir à l’Église pour recevoir ce qu’elle ne saurait se donner et spécialement pour recevoir les Sacrements.
Mais, déjà dans la prière familiale, il doit y avoir une ouverture sur l’Église : « Donnez à votre prière, disait Pie XII, un accent vraiment catholique : priez avec l’Église et pour l’Église ».
L’Eglise est une famille qui éduque la famille.
À Zagreb, Benoît XVI disait : « L’édification de chaque famille chrétienne se situe dans le contexte de la famille plus vaste, de l’Église qui la soutient et la conduit avec elle… Et, réciproquement, l’Église est édifiée par les familles, “petites Églises domestiques” ». Le Saint Père invitait à une prière : « Prions le Seigneur pour que les familles soient toujours plus des petites Églises, et que les communautés ecclésiales soient toujours plus une famille ».
A l’intention des prêtres, il faisait remarquer que « l’accompagnement des familles est la toute fondamentale pour régénérer, toujours de nouveau, l’Église, et aussi pour vivifier le tissu social du pays».
Aux Évêques de France, il rappelait: «Plus la famille sera imprégnée de l’esprit et des valeurs de l’Évangile, plus l’Église elle-même en sera enrichie et répondra mieux à sa vocation».
Le Cénacle, modèle de l’Eglise et de la famille en prière.
Pie XII, Jean-Paul II et Benoît XVI proposent, tous les trois, ce modèle de prière en famille qu’est la prière de l’Église au Cénacle, autour de “Marie, la Mère de Jésus”, dans l’attente de l’Esprit-Saint ; c’est ainsi que, dans sa « Lettre aux familles », Jean-Paul II évoque l’effusion du Saint Esprit : « C’est de cette “effusion de l’Esprit-Saint” que naît la force intérieure des familles, comme aussi la puissance capable de les unifier dans l’amour et dans la vérité ».
Le fondement sacramentel de l’Église domestique.
C’est peut-être la partie la plus originale et la plus profonde de « Familiaris Consortio », que celle où Jean-Paul II parle du fondement sacramentel de l’Église domestique. L’Église domestique naît au Baptême et lors du Sacrement de Mariage.
Le Catéchisme de l’Église Catholique souligne lui aussi, que le culte domestique a son fondement dans le Sacrement du mariage. « La famille chrétienne est le premier lieu de l’éducation à la prière. Fondée sur le Sacrement de mariage, elle est l’Église domestique, où les enfants de Dieu apprennent à prier “en Église” et à persévérer dans la prière ». Cette dernière expression est bien évidemment une allusion à l’Église apostolique en prière au Cénacle.
Liturgie et prière personnelle.
Tout naturellement se pose la question du rapport entre la prière de l’Église domestique et « la prière liturgique de l’Église entière » (F.C. n° 61).
La Constitution Conciliaire établit qu’il y a un rapport entre l’offrande “de la victime spirituelle” et notre transformation en “une offrande éternelle” (secrète du Lundi de la Pentecôte). C’est assez dire tout ce qu’a de vital (au sens propre) le rapport entre le Sacrifice offert par le Christ à son Père et l’offrande de nous-mêmes en Sacrifice à la gloire de Dieu.
Jean-Paul II nous dit : « Un but important de la prière de l’Église domestique est de constituer pour les enfants, une introduction naturelle à la prière liturgique de l’Église entière, aussi bien dans le sens d’une préparation à la prière liturgique que dans le sens d’une extension de celle-ci au domaine de la vie personnelle, familiale et sociale ».
Ce va et vient de la prière familiale à la prière liturgique, et inversement, est évident dans la participation familiale à la messe dominicale. Quoique, de façon moins courante, le bienheureux Jean-Paul II invite aussi les familles à réciter en commun l’office divin.
Chers pèlerins,
On peut se poser la question de la fécondité de la prière familiale. Benoît XVI l’a décrite en termes très précis et très forts à Zagreb : « Les familles chrétiennes sont une ressource décisive pour l’éducation à la foi, pour l’édification de l’Église comme communion et pour la présence missionnaire dans les situations les plus diverses de la vie. (…) L’accompagnement des familles est la route fondamentale pour régénérer toujours de nouveau l’Église et aussi pour vivifier le tissu social du pays ».
La bienheureuse Mère Teresa nous donnera le mot de la fin : «Transmets la prière à ta famille, transmets-la à tes petits-enfants. Enseigne-leur à prier. Car un petit qui prie est un enfant heureux. Une famille qui prie est une famille unie. L’on rapporte si souvent le cas de familles brisées. Et, à y regarder de près, pourquoi le sont-elles ? C’est, je crois, parce qu’elles n’ont jamais connu la communauté de la prière. Elles ne se sont jamais offertes en prière devant
le Seigneur ».