Entretien avec l’abbé Paul Giard,
prêtre de la Fraternité Sacerdotale Saint Pierre
L’Assomption : Comment peut‐on définir l’Assomption?
Le dogme de l’Assomption affirme que la Très Sainte Vierge Marie à la fin de sa vie terrestre a été préservée de la corruption du tombeau et donc qu’elle a été élevée au ciel avec son âme mais aussi avec son corps.
A quel moment l’Eglise a‐t‐elle proclamé ce dogme?
Très tardivement, c’est le dernier dogme proclamé par l’Église, en 1950 par le pape Pie XII dans la constitution apostolique « Munificentissimus Deus ». L’Assomption de la bienheureuse Vierge Marie n’est pas décrite dans la Sainte Écriture, elle nous a été transmise par la Tradition. Elle est fondée sur le dogme de l’Immaculée Conception puisque la Sainte Vierge était préservée de la souillure du péché originel et de tout péché personnel, elle n‘était pas soumise en droit à la mort et à la corruption. Son corps a été préservé de cette corruption, elle a été élevée âme et corps au ciel.
Les traditions de l’Église d’Orient et d’Occident sont‐elles similaires sur le dogme de l’Assomption ?
Les églises orientales traditionnellement estiment que la Sainte Vierge n’est pas morte précisément parce qu’elle n’y était pas tenue, étant préservée du péché, et donc qu’elle s’est endormie (ils parlent de dormition) et qu’elle a été élevée au ciel par les anges sans connaître la séparation de l’âme et du corps.
Les latins en général estiment que la Sainte Vierge a connu la mort comme Notre Seigneur et qu’elle a été ressuscitée immédiatement puis a été élevée ensuite au ciel dans cet état. Comme son divin Fils, elle aurait voulu connaître cet état de mort pour s’unir au sacrifice du Christ et aussi pour nous obtenir un certain nombre de grâces, pour nous servir de modèle.
A quel endroit s’est déroulée l’Assomption, la montée au ciel de la Très Sainte Vierge ?
Deux lieux différents sont évoqués :
- Éphèse où Notre Dame avait suivi saint Jean puisque Notre Seigneur l’avait confiée au disciple qu’Il aimait, sur la Croix.
- Jérusalem près du Cénacle. Il y a d’ailleurs une belle basilique consacrée à ce mystère.
Le Cénacle vient d’être mentionné, pourquoi appelle‐t‐on la Sainte Vierge reine des apôtres ?
Si l’une des traditions situe l’Assomption tout près du Cénacle c’est certainement pour faire le lien avec le collège des apôtres. Nous savons par la Sainte Écriture que la Sainte Vierge était présente le soir du jeudi Saint et également à la Pentecôte, ce qui atteste qu’elle tient une place tout à fait particulière dans le collège des apôtres. Les litanies de Notre Dame de Lorette nous la font honorer comme reine des apôtres mais aussi reine des patriarches, reine des confesseurs, reine des martyrs, reine des vierges, reine de tous les saints et même avant tout reine des anges.
La Sainte Vierge est montée au ciel, a été élevée à la gloire céleste, pourquoi la Sainte Trinité l’a‐t‐elle couronnée ?
Lorsque la Sainte Trinité couronne la Sainte Vierge, comme nous le méditons dans les mystères du rosaire et comme la liturgie nous le rappelle, Dieu ne fait que couronner ses propres dons et ses propres mérites, mérites acquis par Notre Seigneur Jésus‐Christ sur la Croix.
Ce que Dieu couronne dans la Sainte Vierge, c’est précisément le triomphe de la grâce. Rien en elle ne s’est soustrait à l’action bienfaisante et rédemptrice de la grâce. Et à ce titre, le couronnement de la Vierge est d’abord la glorification de la grâce divine, du don de la sainteté que Dieu fait à tout homme.
Quel enseignement peut‐on retirer du dogme de l’Assomption pour nous?
L’enseignement principal que nous pouvons en tirer, c’est la toute‐puissance de la grâce. Le bon Dieu couronne ses propres dons, Il peut le faire aussi en nous si toutefois nous acceptons, nous accueillons cette grâce et nous Lui permettons de produire son fruit dans notre vie.
Il existe aussi un deuxième enseignement qui est bien illustré par tout ce que paradoxalement nous ignorons du mystère de la mort, de la résurrection et de l’Assomption de la bienheureuse Vierge Marie. Nous ne savons pas justement si elle est morte, nous ne savons pas si elle est ressuscitée, nous ne savons pas avec certitude où tout cela s’est passé, nous ne savons finalement rien de toute la fin de la vie de la Sainte Vierge. Même saint Jean, qui a vécu avec elle un certain nombre d’années, ne nous a rien rapporté à son sujet après la Pentecôte. Et cela, c’est un enseignement très riche sur la valeur de la vie cachée, la valeur de toutes ces actions que personne ne voit, que personne ne connaîtra et qui pourtant sont autant d’acceptations de la grâce de fidélité aux dons de Dieu. Ces actions, ces fidélités cachées, ce sont elles qui constituent la sainteté à laquelle Dieu nous appelle avant tout.
Bibliographie ‐ Pour aller plus loin :
‐ « Munificentissimus Deus » ‐ Constitution apostolique de Pie XII, parue dans différentes éditions.
‐ « Définition Solennelle De L’Assomption » ‐ Editions Saint Augustin –2001 ‐ Cardinal Charles Journet
‐ « Mystère de Marie » – Marie-Dominique Philippe, o.p., La Colombe, 1958